Last posts on dolan2024-03-29T06:57:13+01:00All Rights Reserved blogSpirithttps://www.hautetfort.com/https://www.hautetfort.com/explore/posts/tag/dolan/atom.xmlCinéambulanthttp://cineclubambulant.hautetfort.com/about.html2016, très belle année de cinématag:cineclubambulant.hautetfort.com,2016-12-31:58930072016-12-31T10:46:00+01:002016-12-31T10:46:00+01:00 2016 : année de cinéma aussi passionnante que l’actualité aura été...
<p>2016 : année de cinéma aussi passionnante que l’actualité aura été dégueulasse. 2016 a été une année idéale pour se réfugier dans les salles obscures même si beaucoup de films ont fait écho aux horreurs du monde. Je me souviens de <em>Moi, Daniel Blake</em> (Loach) aussi bien pour sa fin triste que pour les minutes qui ont suivi ma sortie du cinéma. Je marchai avenue de Flandres (Paris 19) où s’entassaient sur plus d’une centaine de mètres les tentes de migrants. La désolation du film se prolongeait dans la rue, bien plus intensément.</p><p><img src="http://cineclubambulant.hautetfort.com/media/01/01/63419959.jpg" id="media-5535692" alt="" /></p><p>En 2016, les films que j’ai préférés sont les suivants :</p><p><strong><a href="http://cineclubambulant.hautetfort.com/archive/2016/08/30/toni-erdmann-maren-ade-chercher-le-bonheur-5841820.html">Toni Erdmann</a></strong> : parce que c’est un film drôle et sinistre qui met tout son cœur à nous faire aimer la vie dans un contexte des plus désespérants : la vie solitaire d’une expatriée dans la Roumanie essorée par les multinationales. Maren Ade a réalisé pour moi le film le plus original de 2016.</p><p><strong>Diamant noir</strong> : parce que dans ce film noir d’Arthur Harari, le beau Niels Schneider joue un personnage tragique digne du Lantier / Gabin de <em>La bête humaine</em> (Renoir). Cet homme lesté d’une hérédité trouble cherche sa vérité dans le milieu fermé des diamantaires anversois. Pas courant dans le cinéma français cette veine romanesque à la Zola.</p><p><strong>Elle </strong>: parce que c’est du Chabrol abâtardi par un hollandais ricanant. Isabelle Huppert y joue la reine des tordues, à laquelle Verhoeven adjoint une cours de personnages tout aussi pervers. La trame du thriller n’est pas très rigoureuse mais ce film s’amuse à tremper dans le malsain les plus beaux spécimens de la bourgeoisie française.</p><p><strong><a href="http://cineclubambulant.hautetfort.com/archive/2016/09/27/juste-la-fin-du-monde-dolan-juste-emouvant-5853069.html">Juste la fin du monde</a></strong> : parce que Xavier Dolan utilise les stars du cinéma français comme un orchestre de solistes tonitruant. Chacun joue sa brillante partition sans pouvoir s’accorder aux autres. C’est bien souvent dans les réunions de famille, au milieu des <em>siens</em>, qu’on se sent le plus seul. Après <em>Mon roi</em>, Vincent Cassel est encore prodigieux.</p><p><strong>Julieta </strong>: parce que Pedro Almodovar dirige ce mélodrame simple d’une main souveraine. Il est parvenu à faire de cette femme abandonnée par sa fille unique une héroïne tragique, un personnage de la mythologie croyant semer la malédiction autour d’elle. Chez l’espagnol on retrouve cet art pointilleux de la couleur, des costumes et des décors qui en disent plus qu’une page de dialogue. On a beau s’y attendre, c’est un vrai maître !</p><p><strong>Café society</strong> : parce qu’après tant de films, pour certains mauvais (Scoop, Blue Jasmine, To Rome with love), Woody Allen arrive à m’émouvoir avec une histoire très sentimentale d’occasions manquées. D’une photographie luxueuse, digne des tableaux de Tamara Lempicka, il rend un hommage attendri à l’âge d’or d’Hollywood et à Fitzgerald. Jesse Eisenberg et Kristen Stewart se croiseront sans pouvoir s’aimer, hélas !</p><p><strong>Les ogres</strong>: parce que j’ai aimé suivre sur les routes de France cette troupe débraillée de saltimbanques jouant du Tchekhov. Parce qu’avec ses accents généreux et <em>slaves, </em>ses disputes homériques et ses coups de cafard, le film de Léa Fehner bouscule les convenances psychologiques et sociologiques du cinéma français. De plus, on y découvre en M. Déloyal un fabuleux comédien : Marc Barbé. </p><p><strong><a href="http://cineclubambulant.hautetfort.com/archive/2016/11/11/mademoiselle-de-park-chan-wook-encore-un-film-culte-5872812.html">Mademoiselle</a> </strong>: parce qu’il fallait mettre un représentant de ce cinéma coréen outrancier que j’aime tant et que celui-ci surpasse <em>The strangers</em> et <em>Dernier train pour Busan</em>. Parce que Park Chan-Wook n’a pas peur de marier romance lesbienne, cruauté sadienne, thriller, peinture et manuscrits précieux pour raconter une histoire de libération féminine.</p><p><a href="http://cineclubambulant.hautetfort.com/archive/2016/01/15/les-huit-salopards-5745395.html"><strong>Les huit salopards</strong></a>: parce que c’est mon mauvais goût à moi ! Un film ultra-bavard, crasseux et violent qui aurait dû me dégouter pour longtemps de Tarantino. Au contraire ! Huis-clos débordant de haine et de mauvais esprit contre l’Amérique à la Walt Disney, comme une prémonition de l’élection de Donald Trump…</p><p><strong><a href="http://cineclubambulant.hautetfort.com/archive/2016/12/24/paterson-jarmusch-portrait-d-un-poete-5890959.html">Paterson</a> </strong>: parce que les cheveux noirs de Golshifthe Farahani, étalés sur l’oreiller, c’est de la poésie qui jaillit dès le réveil.</p><p>Sinon, il y a eu d’autres films, honorables ou excellents qui auraient pu figurer dans ce classement mais qui ont manqué pour moi d’un quelque chose qui ne s’explique pas toujours : <em>Carol, Aquarius, Manchester by the sea, The strangers, Moi Daniel Blake, Dernier train pour Busan, Merci patron, Ma loute, La loi de la jungle, Nocturama, Premier contact</em>…</p><p>Petite mention (positive) à <em>Comancheria</em> de David Mc Kenzie. Ce film classique ne révolutionne rien mais il a la beauté et la solidité d’un western d’antan. Deux frères (Ben Foster, Chris Pine) braquent des banques pour sauver la propriété de leur mère menacée d’une saisie. Ils sont poursuivis par un rangers bourru joué par Jeff Bridges, personnage symbolisant la justice immanente censé s’abattre sur les criminels. On a beau être au Texas, contrée qui ne rigole pas avec le crime, le scénario nous montre comment un fait divers peut se légitimer dans une lutte désespérée entre prolétaires et compagnies qui pillent ce pays autrefois prospère. Le film parvient à être glamour par l’intermédiaire du charismatique Chris Pine, tout en étant social. Le Texas y est un personnage à part entière de <em>Comancheria</em>. La caméra nous le montre dans sa réalité crue : petits villes ennuyeuses, peuplées de gens appauvris et besogneux, terre aride, mutilée par les puits de pétrole.</p><p>Petite mention (négative) à <em>the Assassin</em> de Hou Hsia-Hsien. Avant que cette année ne s’achève, je me suis dit que je ne pouvais pas manquer le « chef d’œuvre » du maître taïwanais. Craignant qu’à l’issue d’une grosse journée de travail, il ne provoque les mêmes effets soporifiques qu’un Apichatpong Weerasethakul, je décidais de le visionner en VOD un samedi de vacances, l’organisme densément pourvu en caféine, au cas où. Hélas, ce film adoré de la critique est tellement hermétique et désincarné qu’il m’a assommé. Certes il est splendide visuellement mais comme la plupart des films à costumes asiatiques. Certes la sublime Shu Qi joue, ô paradoxe, un assassin qui n’assassine que rarement et j’aurais dû être sidéré par tant d’audace. Mais cette histoire assez simple quand on lit le résumé, est narrée de manière si obscure ! A moins que vous ne soyez titulaire d’un doctorat en sinologie ou que le plissement délicat et imperceptible d’une soie éclairée à la bougie provoque en vous des torrents de ravissement, vous en sortirez en état de somnolence avancé. Quand des critiques commencent par vous dire qu’en fait il ne faut surtout pas chercher à comprendre l’intrigue et qu’il ne faut surtout pas confondre ce film de sabre (wu-xia pan) avec un film de sabre, qu’il faut avant tout se laisser emporter (mais par quoi exactement ?), c’est qu’il y a un léger problème…</p><p>Conclusion : 2016, année de cinéma hybride, impur, imparfait où les genres ont été plutôt malmenés, pas toujours avec réussite mais c’est tant mieux !</p>
Cinéambulanthttp://cineclubambulant.hautetfort.com/about.htmlJuste la fin du monde (Dolan): juste émouvanttag:cineclubambulant.hautetfort.com,2016-09-27:58530692016-09-27T10:22:00+02:002016-09-27T10:22:00+02:00 J’avais des craintes concernant Juste la fin du monde de Xavier Dolan....
<p>J’avais des craintes concernant <em>Juste la fin du monde</em> de Xavier Dolan. Avant sa sortie en salles et à Cannes cette année, on parlait de dialogues hystériques, de sur-jeu, d’huis-clos artificiel. J’ai vu un film très touchant qui tire indubitablement sa force de sa troupe d’acteurs et de son texte. Je ne connais pas Jean-Luc Lagarce, dramaturge français mort en 1995, mais en lisant la chronique wikipedia qui lui est consacrée, je vois quelle matière première Dolan a exploité, non pas une satire premier degré de la famille mais un travail sur la parole, qui à force de se chercher et de se reformuler, creuse son propre trou et s’enterre. La parole ici souligne davantage les distances entre les êtres qu’elle ne les rapproche.</p><p><img src="http://cineclubambulant.hautetfort.com/media/00/01/1946975259.jpg" id="media-5465307" alt="" /></p><p><strong>Passionnante matière que la parole</strong></p><p>Par la voix off de Louis (Gaspard Ulliel) nous est révélé dès le début du film le drame du personnage. Il va mourir et souhaite l’annoncer à sa famille pas vue depuis 12 ans. A la maison, dans la campagne canadienne, l’attendent sa mère (Nathalie Baye peinturlurée), Antoine son frère aîné (Vincent Cassel l’hétéro-beauf à cran), Suzanne sa sœur paumée (Léa Seydoux en crise d’ado) et sa belle-sœur Catherine (Marion Cotillard en godiche). Tous les personnages sont caractérisés à outrance, individualisés, singularisés et enfermés dans autant de gros plans faciaux. Chacun est prisonnier de son cadre et parle pour lui-même. La mise en condition du spectateur est d’autant plus pesante qu’au flot de parole de sa sœur ou de sa belle-sœur, Louis répond par des phrases courtes et gênées. Sa mère lui dit « c’est bien toi, toujours des réponses en trois mots » et quelque chose de très pesant attrape le spectateur. Gros plans sur l’horloge de la maison, le temps familial est un supplice mais Xavier Dolan réussit à créer des ouvertures, une fenêtre, un flash-back ou un plan large qui permettent de sortir de la logique solitaire dans laquelle chaque personnage est enfermé. Le spectateur peut respirer par intermittences tandis que le dialogue s’étire, se corrige, se reformule. Passionnante matière que cette parole qui tout en créant les questions et les réponses entretient le suspense et reporte à plus tard la révélation de Louis. Suzanne s’interroge : y a-t-il eu un traumatisme ou un drame passé dans sa famille ? Même pas, il n’y a pas de grosse intrigue souterraine, on n’est pas dans <em>Festen</em>. Le drame malgré les mots à foison, c’est l’incapacité à écouter et à dire vraiment les choses. Chacun a sa tactique pour esquiver la vérité. La mère, comme toute bonne mère, assigne un rôle à chacun des enfants et reste immuable. Le frère utilise le sarcasme brutal et la grossièreté. En même temps, plus le dénouement approche, plus la vérité se fait jour. La scène de dispute finale, très lumineuse, donne le sentiment au spectateur qu’ils devinent presque pourquoi leur frère est revenu. Cette scène joliment éclairée baigne dans la précipitation, la panique et les pleurs, comme si Louis devait partir et ne surtout pas dire ce qu’il a à dire.</p><p><strong>Condition sexuelle singulière</strong></p><p>Il semble réducteur de considérer <em>Juste la fin du monde</em> comme un film sur la famille et son incommunicabilité. Il y a bien sûr des observations drôles et justes sur ces histoires qu’on rabâche en famille, sur les piques qu’on lance l’air de rien. Il y a aussi cette propension insupportable et destructrice des parents à assigner définitivement un caractère ou une place à chaque enfant. Toute personne peut se reconnaître dans ces constats. Le fait que Louis soit homosexuel et qu’il ait quitté un milieu modeste hétérosexuel pour un milieu gay et artiste paraît plus fondamental. Le dialogue souligne à de nombreuses reprises la distance culturelle entre Louis et sa famille, entre l’urbain qu’il est devenu et les provinciaux qu’ils sont. Cette distance s’affiche dans la parole : celle d’Antoine est sans fard, agressive, celle de Louis retenue et implicite. Comme dit Antoine qui lui préfère se taire « pour donner l’exemple aux autres », Louis « se sert des mots pour mieux nous enculer » ! L’homosexualité quant à elle est évoquée dans la discussion avec Catherine sur les enfants et par le flashback sur Pierre Jolicoeur, amant de jeunesse. On ne sait pas si cette condition a généré des drames, ça n’a pas l’air le cas, mais le fait que ce personnage-là ne puisse pas communiquer avec sa famille m’a paru révélateur. Sa condition sexuelle singulière, la distance culturelle, spatiale et temporelle qu’il a mise avec eux le place dans une situation où il lui est particulièrement difficile de partager quelque chose avec sa famille.</p><p>Xavier Dolan a ses tics agaçants: figures maternelles bêtasses et maquillées à la truelle, interludes clippés kitsch, propension aux scènes de cris. Choses qui m’avaient plutôt épuisé dans <em>Mommy</em>, qui perdurent dans ce film-là mais contrebalancées par la puissance de certaines scènes (dans la voiture avec Antoine) et par l’extrême douceur de Louis, personnage condamné par la maladie. Malgré ou grâce aux cris et aux numéros d’acteur, le drame silencieux de cet homme au regard bleu et doux, en contrepoint, n’en est que plus émouvant.</p>
Edouard S.http://nightswimming.hautetfort.com/about.htmlLes amours imaginairestag:nightswimming.hautetfort.com,2010-10-14:29437352010-10-14T21:52:00+02:002010-10-14T21:52:00+02:00 (Xavier Dolan / Canada / 2010) ■□□□ La caméra gigote ou se colle, les...
<p style="text-align: justify;">(Xavier Dolan / Canada / 2010)</p><p style="text-align: justify;"><span style="font-size: medium;">■□□□</span></p><p style="text-align: justify;"><img id="media-2696666" style="float: left; margin: 0.2em 1.4em 0.7em 0;" src="http://nightswimming.hautetfort.com/media/01/01/749248072.jpg" alt="lesamoursimaginaires.jpg" />La caméra gigote ou se colle, les intermèdes ont l'allure de la confession télévisée mal assurée, les scènes de lit sont maniéristes et monochromes, rouges, puis vertes, puis bleues. Les réminiscences cinématographiques se succédent toutes les cinq minutes et chacun peut en faire une moisson, suivant ses goûts et ses connaissances : Godard, Wong Kar-wai, Eustache, Arcand, Edwards, Demy, Truffaut... Les musiques sont mises bout à bout : sur une corde à linge sont accrochés Bach et Dalida, Indochine et House of Pain, Police et France Gall. Et Xavier Dolan veut tout faire : metteur en scène, acteur, dialoguiste, scénariste, monteur, costumier, décorateur...</p><p style="text-align: justify;">On en vient à se demander s'il ne devrait pas se tenir à un seul poste, utiliser une seule ambiance sonore, poursuivre un seul modèle et travailler une seule esthétique. Car de l'accumulation ayant cours dans ces <strong><em>Amours imaginaires</em></strong> ne naît ni vertige, ni débordement, mais plutôt un sur-place désespérant. Les trucs de mise en scène s'annulent lorsque les interminables ralentis et les tranchantes ellipses finissent par procurer la même apathie. Les références sont lassantes, cela d'autant plus que certaines affleuraient déjà dans le film précédent. La diversité musicale peut véhiculer l'idée sympathique d'une émotion réelle qui n'a que faire de la "noblesse" des sources entendues mais ces morceaux sont tous utilisés de la même façon et tendent étrangement vers le même but, niant ainsi leurs qualités propres.</p><p style="text-align: justify;">Par rapport à son rafraîchissant premier effort, <a href="http://nightswimming.hautetfort.com/archive/2009/08/05/j-ai-tue-ma-mere.html"><em>J'ai tué ma mère</em></a>, Dolan a commis, à nos yeux, au moins deux erreurs. Le jeune cinéaste n'a pas inventé le narcissisme cinématographique. Se regarder tourner, se regarder en train d'être filmé, d'autres l'ont fait avant lui, et parfois avec bonheur, cette posture pouvant être aussi agaçante que fascinante. La prétention mal placée n'est pas nichée ici mais dans la volonté de tirer d'un sujet rabattu quelque chose de neuf (on pourrait dire : de l'habiller à la mode). <em>Les amours imaginaires</em> reposent sur trois fois rien. Il est assez stupéfiant de voir à quel point le triangle amoureux dessiné dès les premières minutes reste figé. Si le propos émis par Dolan agace, c'est qu'il ne subit aucune évolution. Son film paraît tourner en rond, prisonnier des limites posées par les personnages : Nicolas reste opaque, Francis et Marie font la gueule et minaudent à longueur de journée. Personne n'agit, rien ne bouge. L'immobilisme contraint dans <em>J'ai tué ma mère</em> se trouvait justifié par son sujet : l'oppression exercée par le foyer maternel sur un jeune homme en mal d'indépendance. De plus, s'en dégageaient une vitalité, un sentiment d'urgence, une envie d'en découdre (avec son âge, avec son image, avec le monde, avec le sujet) qui ont déserté la chronique suivante.</p><p style="text-align: justify;">Le ton a également changé et nous abordons là le deuxième écueil. Sous le fétichisme des atours colorés, nous sommes supposés trouver gravité et profondeur mais la démarche est trop évidente et univoque pour nous toucher. Une fois encore, <em>J'ai tué ma mère</em> proposait un cheminement bien plus intéressant, avec son mal-être moins poseur et son rire plus franc et plus cassant. C'est d'ailleurs bien là que Xavier Dolan est le meilleur, les quelques scènes réussies des <em>Amours imaginaires</em> nous le confirment, celles dans lesquelles éclatent rage, méchanceté et vacheries. De rares aspérités dans un film trop étroit, trop refermé et trop lisse.</p>
Edouard S.http://nightswimming.hautetfort.com/about.htmlJ'ai tué ma mèretag:nightswimming.hautetfort.com,2009-08-06:23158522009-08-06T19:02:00+02:002009-08-06T19:02:00+02:00 (Xavier Dolan / Canada / 2009) ■■■□ J'ai tué ma mère est...
<p style="text-align: justify;">(Xavier Dolan / Canada / 2009)</p> <p style="text-align: justify;"><span style="font-size: medium;">■■■□</span></p> <p style="text-align: justify;"><img src="http://nightswimming.hautetfort.com/media/02/02/205376286.jpg" id="media-1912832" alt="jaituemamere.jpg" style="border-width: 0; float: left; margin: 0.2em 1.4em 0.7em 0;" /><i><b>J'ai tué ma mère</b></i> est revigorant comme une chanson punk. Du punk tendance <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/The_Undertones">Undertones</a> plutôt que Sex Pistols, soit un punk "pop", dans lequel le nihilisme cède la place à une révolte trahissant avant tout une demande desespérée d'attention de l'autre (*). La jeunesse, l'aspect frondeur et la joie du coup de gueule se retrouvent dans ce premier film de Xavier Dolan, auteur complet (scénariste, metteur en scène et acteur principal, à compétences égales). Insister sur l'âge du jeune homme (17 ans à l'écriture, 19 au tournage, 20 à Cannes) ne revient pas seulement ici à prendre acte du phénomène : il est en effet essentiel de savoir que <i>J'ai tué ma mère</i> est un film réalisé au coeur même de l'adolescence. Bien sûr, s'y déploient des aspirations fortement liés à cet âge, telles que l'ouverture à la poésie ou la tentative de journal (vidéo) intime, ainsi que l'étourdissement des sens par la sexualité, la danse ou la drogue.</p> <p style="text-align: justify;">L'argument est ténu. Hubert ne supporte plus sa mère (qui l'élève seule dans sa petite maison) mais ne peut se résoudre à la repousser irrémédiablement. Ni avec toi, ni sans toi. Cet amour-haine se décline donc au rythme des allers-retours d'Hubert, des fugues et des abandons, et surtout des crises de nerfs provoquant chez le jeune homme un déversement de paroles vindicatives et blessantes. La répétition de ces éclats a tendance à les dédramatiser et certains sont proprement irrésistibles, par l'invention des répliques et la présence des deux comédiens (un point reste à éclaircir : dans quelle mesure l'accent québécois oriente notre réception comique du film ? ce paramètre a-t-il été pris en compte par Dolan ? joue-t-il volontairement dessus, l'accentue-t-il ?).</p> <p style="text-align: justify;">L'équilibre entre comique et tragique séduit réellement car il repose sur un dispositif mis en place avec une étonnante maîtrise. Xavier Dolan semble savoir exactement ce qu'il fait. Il joue de manière assez réjouissante sur l'attente du spectateur en repoussant par des blancs les réponses les moins évitables et les plus chargées (d'émotion ou de références) : "<i>...ma mère est morte</i>" (à la prof), "<i>...je t'aime</i>" (à sa mère). Les intermèdes et les ruptures musicales laissent affleurer certaines réminiscences (la plus évidente renvoie à Wong Kar-wai) mais parviennent à se fondre dans le mouvement général et traduisent parfaitement les "déconnexions" intempestives de l'esprit adolescent. Le cadre resserré, très sensible dès les premières minutes avec la fragmentation imposée aux visages, laisse entrer aussi peu d'individus que de lumière et semble repousser ainsi le monde extérieur pour mieux en recréer un autre, plus personnel, dans un geste, encore une fois, très adolescent. Une distanciation est à l'oeuvre, s'ajoutant à l'humour des situations, ainsi qu'un effet de confinement et de récit intemporel (les posters aux murs représentent James Dean ou des tableaux de Munch ; Dolan a-t-il craint de réaliser un objet facilement démodable ?).</p> <p style="text-align: justify;">On remarquera également la belle galerie de personnages, tous remarquablement dessinés et campés. Rarement ado aura aussi bien porté la mèche sur les yeux. La mère est quant à elle, par moment, vraiment chiante et le père, qui déboule à mi-récit, en impose tout de suite. Le final est imparfaitement bouclé mais les images d'enfance tournées en amateur achèvent, par l'interrogation sur leur statut réel, de rendre le film attachant. Attachant et bluffant.</p> <p style="text-align: justify;"> </p> <p style="text-align: justify;">(*) : Si l'on prolonge le parallèle musical, sur le plan purement thématique cette fois-ci, on ne peut qu'évoquer l'univers de Morrissey et des Smiths. Sensation d'être une personne à part, forte relation à la mère, goût pour les icônes et les poètes, dureté des pensionnats, humour cassant, homosexualité : ce dont parle Dolan, Morrissey l'a chanté comme personne.</p> <p style="text-align: justify;">Deux autres avis, très différents dans l'approche mais similaires dans le jugement final : celui de <a href="http://365joursouvrables.blogspot.com/2009/07/il-tue-sa-mere-son-film.html">Joachim</a> et celui de <a href="http://www.toujoursraison.com/2009/07/jai-tue-ma-mere.html">Rob Gordon</a>.</p> <p style="text-align: justify;">Merci à Nicolas pour la recommandation.</p>